Jah Mae Kân est né à Paris de parents camerounais. Il s'investit dans l'écriture au début des années 90. Cette décennie aura été bien amère car il connaîtra cette galère que d'aucuns nomment l'exclusion. D'heureuses rencontres seront: René Char, Roger Somville, John Coltrane, Victor Hugo, Albert Ayler, Abbey Lincoln, Allen Ginsberg, Verhaeren et les chantres de la Négritude(Césaire, Damas, Guillen, Amiri Baraka, Jayne Cortez, etc.
Il est actuellement bibliothécaire à La Louvière.
Jah Mae Kân a publié en revue (Archipel), Héroïde funèbre à Semira Adamu est sa première publication autonome.
"La révolte et le chagrin guident l'incantation qui sonne comme un hymne à une figure emblématique. Alors que les poètes de la négritude, dans la mouvance de Senghor et de Damas, exaltent la femme dans son rôle d'amoureuse, dans son statut de mère, Jah Mae Kân célèbre le combat de Semira. Heures précieuses, instants d'appel et de lutte, agonie confisquée: J'ai voulu souligner qu'elle est morte en résistante. Aujourd'hui, en Afrique, les femmes sont à l'avant-garde du développement, elles font avancer les choses. Elle aussi, Semira, était capable de faire front."
Françoise LISON, Le Courrier de l'Escaut, 15 mars 2003.
extrait :
semira /
adamu
O SEMIRA ADAMU
ma lyre
ma lyre désormais solidaire
ma lyre désormais courageuse désormais téméraire
ma lyre désormais te célèbre pour aller t'exalter dans l'exemple même de l'hostie
je dis donc que nul
ne saura jamais taire
ton délire ta démence ton cri sans borne sans mesure
ni la ténèbre qui te frappe rosse à coups de coussin sur la tête
pour étouffer ta voix parmi ceux que l’utopie engage
à soulever les pauvres
ni même la brusque vacance de ton corps brutalisé
ni même la brusque stase de ton sang décapité
ni même la négation de ton être sans frontières
mais ici sans papiers / mais ici sans abri / mais ici sans emploi / mais ici sans piston / mais ici sans promesse / mais ici dans l’impasse
ENTRAVE SOUS LA FERULE IMBECILE DE GENDARMES AUX MAINS SALES
ET L’ŒIL COERCITIF ERUBESCENT DU CRIME
CONTRE L’HUMANITE
nul ne saura donc jamais te taire
ni même l’iniquité de ceux qui écoutant la loi dans ce qu’elle a d’inique abominable
profitent de ma condition absurde inconfortable de bougnoule indésirable misérable
pour me réduire abuser taillable corvéable
à la merci des nantis
ni même l’iniquité de ceux qui s’en lavent les mains
et se neutralisent la conscience
dans le douillet confortable des pantoufles
POUR NE PAS ASSUMER TOUTE LA MISERE DU MONDE
QUE TOUTE LEUR FORTUNE IMMONDE
S’EN VA SEMER PAR LE MONDE
nul ne saura donc jamais te taire
parce que toi
tu ne quémandais pas l’aumône
parce que toi
tu ne réclamais que le juste recouvrement de nos créances historiques
PARCE QUE MOI
VIATIQUE A L’OBSTINATION DE TON RESSENTIMENT
VIATIQUE A L’OBSTINATION DE TA CENDRE DURE
ET INDOMPTEE SUR TERRE QUI NOUS EST TOMBE
MAA COOOLEEEEERE / MA COOOOLEEEEEEERE
MA COLEEERE DANS LE CIEL QUI TONNE DE TEMPETES AUGURALES
EXAUCERA LE FEU DE TA SEMENCE
LE FEU DE TA DEMENCE / LE FEU DE TON DELIRE / LE FEU DE TA PAROLE
DANS NOTRE SSSSSOUOUOUOUOUOUOUOUOUOUOUOUFFLE SANS REPIT